C’est toujours du côté gauche du lit que tu arrives, ta silhouette se découpe dans la porte et je te retrouve.
Tu t’agenouilles au pied du lit avec ton peignoir en soie que tu n’as retiré qu’une fois.
Comme si tu avais peur de trop montrer cette splendeur de ton corps que ne méritent pas certains yeux, qui alors font démériter toutes les pyramides. Les chemins menant à ces caveaux sont interminables et semés d’embûches. Et l’on comprend qu’un tel corps et qu’un tel visage veuillent de la retenue et de la pudeur, et un amour sans failles.
Ce visage d’adoration que je caressais tout doucement je l’ai retrouvé un peu de profil en allant dessiner au Louvre les fresques assyriennes.
Comme on peut être amoureux d’un crâne seulement, ou de la courbe d’un dos, je ne pouvais pas t’aimer tout entier tellement tu étais beau.
Dans les boucles de mes cheveux tu écrivais en persan, tu dessinais des mots dans mes cheveux, parfois sur un air de sintur qui est si doux et qui se prête si bien à l’amour, et cette musique elle-même dessine les boucles et les points de la langue persane..
Un jour, comme avec les autres, j’ai décidé de partir, j’avais 19 ans.
J’ai 19 ans.
Alors il m’a regardée est parti vers la porte de la chambre très lentement en disant je sors pour écouter un peu de musique et je reviens.
Alors j’ai dit : moi aussi je sors, dehors.
C’est ce jour-là que j’ai compris le sens de «dedans». Dedans, dehors, il y a deux mondes et je n’avais pas encore envie d’appartenir à un seul de ces mondes.
J’ai essayé de m’habiller mais il avait placé son fauteuil juste derrière la porte et en rentrant avec son peignoir de soie il s’est étendu à terre face contre terre. Et il est resté ainsi des heures. Et j’ai dit je dois sortir.
C’est toujours du côté gauche que tu arrives et tu me dévisses soudain la tête.
J’avais juste peur alors que tu ne me gardes pas dedans éternellement ou alors je voulais encore plus de beauté.
