Dans les geôles de Belmarch

Julian Assange est torturé. Beaucoup je pense l’ont compris et Nils Melzer, rapporteur spécial des Nations unies pour la torture, s’est efforcé en vain de le révéler. 

Emprisonné pour avoir révélé et avoir cherché à donner des secrets militaires qui devaient rester inconnus des simples mortels, de la masse sur laquelle on va les tester, à petites ou fortes doses. Des armes testées en Iraq bien sûr, et où ailleurs ?

Julian Assange est-il un cobaye de ce que j’ai appelé la double peine, c’est-à-dire l’emprisonnement interne et externe ? 

Corps emprisonné dans une geôle et tête enserrée par le harcèlement électromagnétique, double incarcération que double encore le sentiment d’une injustice éprouvée dès lors que l’on se sait absolument innocent de ce que l’on vous reproche. Va-t-on sortir par une porte dérobée celui qui a osé voler des secrets d’Etat et le cacher définitivement aux regards des vivants pour 175 ans de relégation ? On n’entend pas ce nombre sans frémir : Assange est évidemment un symbole, mais aussi un cobaye qui alimente la téléréalité des nations occidentales et donne bonne conscience à des manifestants avides de sens et de liberté.

Est-ce aussi une façon atroce qu’a l’administration pénitentiaire de faire oublier ce que Wilde comme tous les autres prisonniers fait du compte des heures en écoutant les minutes du ménage de la cellule, est ce une façon atroce de gommer tout le Réel qui entoure le crâne du martyrisé ? Sur combien de prisonniers teste-t-on ce harcèlement ? D’où mon interrogation et l’envoi de mon livre à l’Administration pénitentiaire. Car dans des cerveaux détraqués il pourrait bien venir à l’idée de certains d’en équiper les gardiens des prisons surpeuplées, en France surtout…

Voit-on encore sous harcèlement électromagnétique cette «petite tente de bleu que nous prisonniers nommons ciel» dit Wilde (that little tent of blue / Which prisoners call the sky), qui prend donc la forme du triangle qui seul se laisse voir dans ces territoires perdus que nous savons depuis longtemps être des gouffres de l’Inutile, ces prisons absurdes qui ne font qu’éteindre des ardeurs ou au contraire rallumer des révoltes sanglantes…

Ce bleu sous harcèlement dans les geôles de Reading Belmarch doit se fondre dans un noir-gris terrible car il est difficile pour une tête enserrée et vibrionnante de voir cette couleur de l’espoir même dans un triangle. 

Pourtant Assange est en un sens nettement moins dangereux que Wilde. Il n’est pas écrivain, pas artiste, même pas révolutionnaire, et pas vraiment journaliste, juste un hacker.

On a essayé d’éliminer tous les journalistes d’investigation, tous les hackers d’investigation (dont John Mac Affee), tous les… Qui, ensuite ?

Qui, ensuite, naïf au point d’oublier que seule la corruption protège sera le prochain condamné ? Qui, ensuite, lâché par des soutiens faillibles sera relégué ? Qui, ensuite, ruiné par le chantage sera lynché ?

Qui, ensuite ?

Pour cette raison, il faut arrêter là la suite qui serait sinon inépuisable des relégués pour l’exemple et ne pas extrader Assange, et libérer Assange dès que possible pour stopper cette suite d’ensuites…

Ou si l’on veut absolument poursuivre cette lamentable parodie de la justice, aller jusqu’au bout de la dérision et de l’horreur et jouer dans les prisons pour endormir les harcelés de l’électromagnétisme les Suites pour violoncelle seul de Bach.  

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